*Liberté*Une sensation que je parvenais à peine à redécouvrir, maintenant que le calme régnait à nouveau sur l'académie. Un calme relatif, soit dit en passant... Mais cela avait peu d'importance. Au moins, je me sentais vivre. Je n'avais pas la moindre idée du temps que cela parviendrait à durer, alors autant en profiter !
Il était déjà tard dans la matinée quand je m'étais rendue aux écuries. C'était volontaire : je voulais croiser le moins de monde possible. Les cavaliers des équipes étaient déjà partis et la majorité des autres se préparaient pour sortir en ville. La logique aurait voulu que je sorte en effet avec ma meilleure amie, mais elle avait "du travail". Bien. Je n'allais pas m'en plaindre, elle était parfaitement en droit de vivre sa propre vie, et puis pour une fois qu'elle bossait ses cours, je ne pouvais que la féliciter.
Les autres ? Ce n'était pas mes amis. En tout cas pas des gens avec qui j'avais envie de partager le temps que je pouvais accorder aux chevaux. En même temps, c'était ça, l'écurie Hadès. Un regroupement de solitaires. Une énorme contradiction, de ce fait.
Enfin tout ça pour en revenir au fait, j'étais arrivée tard volontairement, tout ça pour qu'on me fiche la paix et accessoirement ne pas me casser la tête dans le choix de la monture. Au moins, j'avais déjà sous les yeux les chevaux pris ou pas. Aucune question à se poser.
Et qui restait-il à mon arrivée ? Mon amour d'Ellidya. Aucune hésitation : si personne n'avait jeté son dévolu sur elle, alors j'allais le faire. Au contraire.
Ni une ni deux, j'avais été chercher de quoi m'occuper d'elle. J'avais pris tout mon temps pour la choyer, tout vérifier, être sûre qu'elle allait au moins aussi bien que moi, sinon mieux encore. De toute évidence, elle était impatiente de sortir de son box, parce que plus je passais de temps auprès d'elle, plus elle s'agitait. Seulement avant d'avoir pu sortir, il était l'heure du déjeuner... Et le nouveau règlement était beaucoup trop stricte pour que je le rate.
Grognon, j'avais foncé et mangé plus vite que jamais pour pouvoir revenir aux écuries et en finir avec la préparation de la palomino pendant que tout le monde partait vers la grille pour rejoindre Vaux-Sur-Les-Pins. Avec tout l'entrainement que j'avais derrière moi, pas de soucis pour l'harnacher rapidement. Ellidya avait boudé un peu à cause de mon abandon, mais dès que j'étais montée sur son dos et qu'elle était dehors, tout allait mieux.
Et maintenant, voilà au moins une heure que j'étais partie dans la forêt, heureuse de simplement pouvoir gambader sans contrainte dans un espace que, globalement je connais. Globalement, oui, parce que là, je me trouvais très précisément dans un secteur que je n'avais encore jamais arpenter. Au pire, tant pis pour les égratignures, je ferais s'envoler Elli' et rentrerais par la voie des airs. D'ailleurs, envisager de rentrer n'était pas une si mauvaise idée, vu et étant donné le temps que j'avais déjà passé en extérieur.
Un peu plus loin, j'entrevis une clairière. Bien parfait, je la connaissais peut-être et pourrais donc retrouver mon chemin. Le sentier qui y mène est plutôt large... Cool ! Une excellente occasion de galoper ! Pas comme si j'en avais eu énormément jusque là. Ni une ni deux, je rends sur les rênes et, sans avoir besoin du moindre encouragement supplémentaire, Ellidya part au galop.
Elle allait vite.
Très vite.
Trop vite.
Mais j'adorais ça.
J'aurais dû faire plus attention, bien entendu, mais cette sensation de liberté était trop enivrante, trop agréable, et surtout trop rare pour que je parvienne à m'en priver. Le vent glacé dans les cheveux, sur ma peau, à travers mon uniforme... L'extase à l'état pur pour un cavalier.
Oui, jusqu'à en apercevoir un autre... Vers lequel on fonce.
Je ne m'attendais pas le moins du monde à trouver quelqu'un ici. En même temps, j'ignorais complètement où je me trouvais. Pas le temps d'esquiver ni d'arrêter Ellidya, la collision aurait eu lieu si l'autre monture n'avait pas fait un bond avant de décampé. De mon côté, au mépris des règles de monte, je tirai de toutes mes forces pour forcer l'abraxan à s'arrêter et ne pris pas la moindre précaution avant de descendre. La seule "fantaisie" que je m'autorisai, les pieds à terre, fut de bloquer les rênes pour éviter que celle dont j'avais pris la charge ne trébuche dedans et se blesse.
Sans perdre de temps, je m'avançai à la rencontre de l'autre cavalier, un jeune homme pas vraiment plus âgé que moi. Ce ne fut qu'en m'avançant vers lui que je réalisais où je me trouvais : la prairie de Vaux-Sur-Les-Pins. Son décor ne pouvait être confondu avec aucun autre dans le secteur, surtout pas avec cette lumière claire qui me rappelait tellement les "dessins-animés" que je regardais, petite, chez les moldus.
« Je suis vraiment, vraiment désolée ! » Commençai-je à m'excuser sans même être arrivée à sa hauteur.
« Je... Vous n'êtes pas blessé au moins ? »A un peu plus d'un mètre, je me stoppais net : il portait sur son uniforme noir l'emblème de l'élite. Ce fut à cause de celui-ci, et uniquement par sa faute, que je le reconnus : celui que l'on avait envoyé dans le labyrinthe avec nous - "nous signifiant, ici, "un groupe d'élèves qui ne se connaissaient ni d'Adam ni d'Eve". Nouvelle prise de conscience, je n'avais rien à faire là, seule du moins, et entre la couleur mon uniforme et le médaillon argenté à mon cou, je ne pouvais pas passer pour une innocente. Et maintenant, j'étais censé faire quoi ?
à rechercher la liberté, tout ce que j'avais réussis, c'était faire revenir les contraintes au galop - littéralement. Loin d'être la plus maligne, je n'avais pourtant jamais été la plus sotte. Maladroite, souvent, mais dans le relationnel, pas quand il s'agissait de me protéger moi-même. Et voilà que tous mes efforts pour lutter pour mes convictions venaient d'être anéantis, simplement par cette faute. Me revoilà...
*Entravée*