Que diable faisais-je ici ? Mes yeux ne cessaient de quitter la scène sur laquelle s'animaient des élèves de beauxbâtons plus ridicules que crédibles. Moi, aimer le théâtre ? Allons bon, croyez-vous vraiment qu'un art ayant pour but de mettre en valeur la capacité des uns et des autres à changer de personnalité prouvant qu'ils sont aptes à vous tromper à n'importe quel moment, très peu pour moi. L'ombre me sied bien plus que la lumière. C'est ainsi en équilibre sur mes deux jambes que je suis debout planté dans un des rideaux du salon. Qui sait si les nés moldus de mon genre ont le privilège d'entrer en ces lieux ... Je n'ai même pas cherché à le savoir, tout ce qui m'importait c'était de la voir elle.

Alors que les acteurs rangent leurs accessoires, je me déplace légèrement derrière le rideau afin d'avoir une vue plus dégagée sur les alentours. Mon regard se tourne vers le salon de Marivaux où, assise avec prestance, Callypso lorgne du regard les élèves comme je l'ai fait précédemment. Je crois qu'elle m'attend ... enfin, j'ose l'espérer ! Cependant, je n'ai nulle intention de me faire remarquer aux yeux de tous alors, patiemment, j'attends. Je sais que je ne suis pas vraiment bien caché puisque mes pieds dépassent du dessous de l'immense rideau dont la rougeur éclatante est ravivée par les derniers rayons de soleil s'immisçant dans la pièce. Ses traits sont tirés, elle est concentrée, je le sais, je le sens. Personne ne vient la voir mais, par précaution, je me mêle à la foule frôlant de trop près le rideau pour passer incognito. Je sais me faire discret aussi, personne ne me remarque. À vrai dire, des têtes brunes comme la mienne, il y en a des centaines ici alors, personne ne prête attention à moi. Cela me laisse le temps de m'extraire de la file et d'aller à sa rencontre.

« Tu n'imagineras pas le temps que j'ai passé caché derrière cet horrible rideau poussiéreux ... »

J'agrippe ses mains et la regarde dans les yeux. Il n'était pas facile d'entrer ici, encore moins d'y rester. Je ne savais pas encore ce qui nous attendais pas il fallait que nous parlions.

« C'était qui lui ? »

Je désigne d'un coup de menton la porte qui se referme sur l'élève auquel Callypso avait été confrontée juste avant que je ne décide de faire mon apparition.

Je ne savais pas pourquoi j’avais choisi de venir assister à tout ça, je ne savais pas pourquoi j’étais là mais j’y étais alors, je devais faire comme si ça m’intéressait. En fait, je pense qu’au fond, je cherchais surtout à passer le temps en attendant de pouvoir trainer avec Mathieu en toute discrétion. Nous réapprenions à nous connaître lui et moi et j’aimais la tournure que prenaient les choses. J’espérais que ça continuerait comme ça mais, je ne préférais pas me faire trop d’espoir car le passé m’avait prouvé que tout pouvait arriver. Je lui avais dit de me rejoindre ici, que nous serions tranquille lorsque plus personne ne serait là mais, je ne savais pas s’il allait venir. J’avais espoir qu’il le fasse mais je comprendrais qu’il ne vienne pas. C’était risqué. Finalement, la fin avait résonné et les élèves commençaient tous à partir. Je les regardais faire, espérant apercevoir la tête brune de mon ami. Ils mettaient beaucoup trop de temps à mon goût à s’en aller et si j’avais pu, je les aurais poussés à aller un peu plus vite. Je faisais comme si je prenais mon temps pour ranger les affaires que j’avais sorti mais, je gagnais simplement du temps et j’évitais que quelques personnes ne se posent des questions.

Sauf que, je fus prise de court par un de mes amis qui vint m’aborder tout sourire et s’asseoir à côté de moi. « Hey Cally, tu viens avec nous ? On va travailler un peu avant d’aller prendre notre repas. » Je le regardais, ne comprenant pas ce qu’ils le prenaient à tous en ce moment pour lui rendre les choses plus difficiles. Elle ne voulait pas attirer l’attention sur le fait que non seulement elle refusait son invitation mais en plus, qu’elle allait rester encore un peu dans la salle alors qu’il n’y avait plus rien à faire. Elle avait peur que des soupçons commencent à faire surface et que ses grands-parents en entendent parler. C’était sa plus grande peur en fait mais, elle préférait ne pas y penser et rester aussi calme qu’elle le pouvait. « Non, je vais rester ici pour réviser. J’ai besoin d’être seule et au calme pour ça. » Je lui souris et il partit peu de temps après. A peine mon ami en direction de la sortie, j’entendis la voix de la personne que j’attendais avec impatience.

« Tu n'imagineras pas le temps que j'ai passé caché derrière cet horrible rideau poussiéreux ... » Il prit mes mains et me regardait dans les yeux. Je lui souris, contente de le voir ici, avec moi. Sa beauté me frappait à nouveau et je me mis à rougir en repensant à la dernière fois que nous nous étions vus. « Oui mais ça valait le coup non ? » Je lui souris malicieusement mais il n’y répondit pas. « C'était qui lui ? » Il m’indiqua la porte que mon ami avait franchit peu de temps avant et je compris. J’avais l’impression qu’une petite pointe de jalousie l’avait poussé à me poser cette question. « C’est un ami, il est dans ma classe. Serais-tu jaloux ? » Je souris, amusée qu’il puisse l’être. Je ne voulais pas qu’il soit fâché, qu’il croit que je jouais sur plusieurs tableaux avec lui. Ma main vint caresser sa joue et je pris soin d’ajouter. « Il ne t’arrive pas à la cheville, sois sans craintes. » Mon ton était légèrement amusé mais, je savais qu’il avait le droit de douter. Après tout, j’avais déjà tout ruiner une fois.